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L’exégèse « genre »

L’exégèse « genre »

 On ne sait pas exactement combien il se publie chaque année d’études bibliques dans le monde, mais ce chiffre doit être astronomique d’après le nombre de revues existantes. Il n’existe pas non plus de véritable étude sur la façon dont ces travaux se distribuent selon chaque école méthodologique, mais on sait que les deux principales « écoles » (la critique historique et la critique formelle) arrivent largement en tête du hit parade.

 Cependant, il existe un troisième courant largement sous-estimé : celui des Gender Studies. Les Gender Studies se développent à une vitesse sidérante, il n’est pas une université qui n’ait son département ad hoc. À l’Université de Genève, il existe même une unité interdisciplinaire d’études genre (sic). Le nombre des publications de cette obédience croit de manière exponentielle. Parmi les Gender Studies, le courant féministe se taille la part du lion. Extrait de la prose « genre »:
Pour démontrer que les catégories fondamentales de sexe, de genre et de désir sont les effets d’une certaine formation du pouvoir, il faut recourir à une forme d’analyse critique que Foucault, à la suite de Nietzsche, a nommée généalogie.  Il s’agit pour cela  de chercher à comprendre les enjeux politiques qu’il y a à désigner ces catégories de l’identité comme si elles étaient leurs propres origine et cause alors qu’elles sont en fait les effets d’institutions, de pratiques, de discours provenant de lieux multiples et diffus.

Vous avez compris que les Gender Studies sont un retour du boomerang de la French Theory, qui nous revient en pleine figure des USA. Je ne saurais pas vous expliquer pourquoi, mais les Gender Studies ont quasiment envahi le champ de l’exégèse tant juive que chrétienne.
Vous pensez bien que si je vous parle des Gender ce n’est pas par hasard. C’est que ces nouveaux exégètes se concentrent essentiellement sur les personnages féminins de la Bible (pour déconstruire le phallocentrisme etc.). Or vous aurez remarqué que ces personnages sont un enjeu central pour l’interprétation midrashique. Ce n’est pas pour rien que nous tournons sans cesse, dans cette revue, autour de Ruth, figure midrashique qui structure, à elle seule, le champ du midrash. Le défi que la méthode midrashique doit relever est donc de se mesurer, résultats à l’appui, aux dizaines de milliers d’articles annuels qui étudient à leur manière Tamar, Rahab Esther et Ruth.
Les Gender Studies utilisent un appareil conceptuel si sophistiqué que nous ne sommes même plus dans le domaine de la concurrence déloyale, on est dans la guerre asymétrique: Psychanalyse, Histoire, Marxisme, Généalogie foucaldienne, Grammatologie, Anthropologie culturelle, Analyse narratologique ou Sémiotique structurale. Face à ces machines discursives, les moyens de l’analyse midrashique paraissent dérisoires: Ce n’est pas avec quelques gezera shava que vous allez convaincre une commission académique… Il est vrai que, pour ladite commission, si Aristote avait entendu parler de ce type de logique, il serait mort sur place d’une crise de fou-rire. Les jeux de mots et le al tiqra ? Ils sont incompréhensibles car il faut connaître l’hébreu, et puis Lacan a fait mieux. Quant à la double entente, pour un Jury de Master, elle semble autant relever de la Psychiatrie que de l’exégèse… Tristes topiques. Le miracle (c’est une façon de parler) c’est que les Gender trouvent toujours le moyen de passer à côté de l’essentiel.
Heureusement, ces Gender font preuve, parfois, d’un peu d’humour, même s’il est involontaire. J’aimerais vous en convaincre en vous invitant à lire ce petit extrait de bibliographie 100% « genre ». 
• Leeb, C.S. « The Widow in the Hebrew Bible: Homeless and Post-menopausal, » PEGLMBS 21 (2001), 61-67.
• Bronner, L.L. « Reclaiming Esther: From Sex Object to Sage, » JBQ 26 (1998), 3-10.
• Sakenfeld, K.D.  « The Story of Ruth: Economic Survival, » in P.H. Williams and T. Hiebert, eds. Realia Dei.
• Brenner, A. « Ruth as a Foreign Worker and the Politics of Exogamy, » in A. Brenner, ed. Ruth and Esther: A Feminist Companion to the Bible (2nd Series). Sheffield: Sheffield Academic Press, 1999b: 159-62.
• Bledstein, A.J., « Female Companionships: If the Book of Ruth were Written by a Woman, » in Feminist Companion to Ruth, 1993:116-133.
• Brenner, A. « Ruth as a Foreign Worker and the Politics of Exogamy, » in A. Brenner, ed. Ruth and Esther: A Feminist Companion to the Bible (2nd Series). Sheffield: Sheffield Academic Press, 1999b: 159-62.
• Efthimiadis, H., « Woman to Womyn: Countering Patriarchal Stereotypes in the Book of Ruth, » JSem 7 (1995), 57-78.
• Nielsen, K. Ruth. Le choix contre le droit dans le livre de Ruth: De l’aire de battage au tribunal VT 35 (1985), 201-12
• Duran, N. « Having Men for Dinner: Deadly Banquets and Biblical Women, » BTB 35 (2005), 117-24.
• Fox, M.V. Character and Ideology in the Book of Esther. Columbia: University of South Carolina Press, 1991b.
• Katz, B.Z. « Irrevocability of Persian Law in the Scroll of Esther, » JBQ 31 (2003), 94-96.
• Lubitch, R. « A Feminist’s Look at Esther, » Judaism 42 (1993), 438-46.
• Nadar, S. « Gender, Power, Sexuality and Suffering Bodes in the Book of Esther: Reading the Characters of Esther and Vashti for the Purpose of Social Transformation, » OTE 15 (2002), 113-30.
• Raguse, H. « The Oedipus Complex in the Book of Esther, » in R. Kessler and P. Vander Meersch, eds.
• Wahl, H.M. « Ester, das adoptierte Waisenkind. Zur Adoption im Alten Testament, » Bib 80 (1999), 78-99.
• Astour, M.C. « Tamar the Hierodule: An Essay in the Method of Vestigial Motifs, » JBL 85 (1966), 185-96.
• Bailey, C. « How desert culture helps us understand the Bible: Bedouin law explains reaction to rape of Dinah, » BRev 7
• Friedman, M., « Tamar, a Symbol of Life: The ‘Killer Wife’ Superstition in the Bible and Jewish Tradition, » AJS Review 15 (1990),23-61.
• Greiner, S.L. « Did Eve Fall or Was She Pushed?, » BRev 15/4 (1999), 16-23, 50-51.
• Hepner, G. « Abraham’s Incestuous Marriage with Sarah: a Violation of the Holiness Code, » VT 53 (2003), 143-55.
• Longacre, R.E. « Genesis as Soap Opera: Some Observations about Storytelling in the Hebrew Bible, » JOTT 7 (1995), 1-8.
• McKay, H.A. « She Said to Him, He Said to Her: Power Talk in the Bible or Foucault Listens at the Keyhole, » BTB 28 (1998), 45-51.
• Otwell, J.H. And Sarah Laughed: the Status of Woman in the Old Testament. Philadelphia: Westminster, 1977.
• Van Der Toorn, K. The Significance of the Veil in the Ancient Near East, » Pomegranates and Golden Bells (1995), 327-339.
• Van Wolde, E. « Love and Hatred in a Multiracial Society: The Dinah and Shechem Story in Genesis 34 in the Context of  Genesis 28-35, » in J.C. Exum and H.G.M. Williamson, eds. Reading from Right to Left. London/NY: Sheffield Academic
• Zorgdrager, H., « The Sacrifice of Abrahm as a (Temporary) Resolution of a Descent Conflict? A Gender-Motivated Reading of Genesis 22, » in E. Noort and E. Tigchelaar, eds. The Sacrifice of Isaac: The Aqedah (Genesis 22) and Its Interpretations. Leiden: Brill, 2002: 182-97.
• Leach, E., « Why Did Moses Have a Sister?, » in Structuralist Interpretations of Biblical Myth. Cambridge: Cambridge University Press, 1983: 33-67.
• Kruger, P.A. « The Removal of the Sandal in Deuteronomy xxv 9: `A Rite of Passage,’ » VT 46/4 (1996), 534-538.
• Grayson, A.K. and J. Van Seters, « The Childless Wife in Assyria and the Stories of Genesis, » Or 44 (1975), 485-86.