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Dictionnaire midrashique 2

Dictionnaire midrashique 2

•  chaire:  Grec : Χαιρε  Terme par lequel l’Ange, en Luc 1, 28, salue Marie. Il est peu probable que l’Ange parlait en grec, il peut donc être intéressant de retrouver le terme hébreu originel. La rétroversion vers l’hébreu de ce terme est difficile car il renvoie à de nombreux équivalents hébraïques:

rani pousse des cris de joie (So 3,14) רני
ou samHi (réjouis-toi) שמחי
ou, plus romantique: sisi (exulte) שישי
ou encore si l’on est chatouilleux sur la traduction: gili (Za 9,9) גילי
Noter que samHi est un candidat sérieux car il possède la valence du messie (52) dont il est même l’anagramme: משיח

 

•  accouchement: Début de l’ère messianique.

L’accouchement midrashique traite de la naissance d’un fils, terme technique pour messie. Il s’agit donc d’une délivrance, précédée, comme il se doit, par les douleurs de l’enfantement. La naissance midrashique doit survenir au terme. Ici, deux tentations: vouloir hâter le terme, ou au contraire repousser indéfiniment la délivrance. Celle-ci fait toujours l’objet d’une annonciation (exemple: Sara) car le messie est annoncé par l’Ecriture. Pourtant l’époque messianique semble une utopie, la mère sera donc stérile  (toujours Sara)  ou trop jeune (Bethsabée) ou le père trop âgé. Mais, en définitive, ce sont les mérites du peuple (de la mère) qui rendent possibles la venue d’un fils. C’est pourquoi Genèse Rabba 58, 1 nous précise que Sara, à cent ans, était comme une femme de vingt ans pour ce qui est du péché. Traduisez: La majorité légale étant (avant la donation de la Loi) de 20 ans, il en résulte que Sara n’a pas connu le péché! Une immaculée conception, déjà.

  

• Péché originel: faute principielle d’Israël. Le péché originel serait une élaboration midrashique. Pour nous expliquer que la faute d’Israël est au principe même de son histoire, que cette faute (l’abandon de l’alliance) explique toute l’histoire d’Israël, son exil et sa rédemption (s’il se repent) on va attribuer cette faute au premier homme, à Adam. La faute d’Adam serait le résultat de cette construction narrative qui, pour parler d’Israël, parle d’Adam. Adam n’est qu’une figure pour parler d’Israël. Adam sera donc celui dont la faute lui vaut l’exil (hors de l’Eden). La désobéissance d’Adam est ainsi à l’origine de la mort (lire: de l’idolâtrie) dans le monde. Le midrash nous dit qu’Adam est un min (un hérétique).

A la fin des temps, Adam-Israël sera lavé de sa faute et pourra revenir au Paradis. Le Testament de Lévi annonce que le Messie ouvrira la porte du Paradis et qu’il mettra fin à la menace du glaive visant Adam. Le judaïsme met ainsi le Messie en rapport avec Adam. Et c’est pourquoi le Christianisme reprendra cette idée: le messie vient pour sauver Adam et ôter le péché du monde.

• Loi du lévirat: Loi de l’ère messianique.  La loi du lévirat entretient un rapport midrashique avec l’ère messianique car la racine ybm a la même valence (52) que celle du messie. C’est ce qui explique que l’on retrouve ce thème dans le livre de Ruth.
Exemple: Tamar est contrainte de rester dans la prostitution (lire: l’idolâtrie) car Juda ne veut pas lui assurer de postérité en la faisant bénéficier de la Loi du lévirat, c’est-à-dire la loi de l’ère messianique qui permettrait son entrée.


• Grain de blé (grec : sitos)  En Jn 12, 23-24 Jésus annonce sa mort en utilisant une parabole par laquelle il se compare à un grain de blé.

Voici venue l’heure où doit être glorifié le Fils de l’homme
En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.

Cette comparaison s’explique par le fait que le terme utilisé dans le grec du Nouveau testament (sitos) est celui qui dans la Septante traduit l’hébreu bar qui signifie aussi en araméen « fils ». Comme toute élaboration midrashique, cette comparaison s’appuie sur d’autres déterminations. Par exemple, en Gn 41, 49 nous lisons que Joseph emmagasina du blé (vayitsbor yossef bar). Le midrash chrétien voit dans ce verset qu’un Joseph est mis en rapport avec du blé (bar) il était donc fondé à l’utiliser. Après tout , Jésus est un bar yossef. Curiosité: en Sanhédrin 96b le messie porte le nom de bar nofli, le grain tombé.

• Jéricho : Ville fortifiée qui verrouille l’accès au Royaume (1). C’est l’image du Mal absolu, car c’est un mal qui se croit en sécurité derrière des murailles, c’est pourquoi Josué doit la détruire totalement (sauf Rahab= les païens repentis). Jéricho est la ville des Palmiers. Selon le Targum, elle est identifiée à la ville Tamar dont parle Ezéchiel. Selon Berakhot 43a la ville est riche en baume et la région fertile en blé. Certains Pères de l’Eglise disposaient encore d’une tradition d’origine midrashique puisqu’ils attribuent le mérite de Rahab au fait qu’elle met sa foi en Dieu plutôt que dans les murailles de sa ville. Ce qui prouve que Jéricho est ici surtout un symbole

Jéricho est le symbole de la fausse sécurité de l’homme devant la fin des temps. Paulin de Nole (132-154) est encore suffisamment proche de l’univers du midrash pour le comprendre: Seule la prostituée Rahab fut sauvée. Parmi les impies elle ….mit sa foi non dans les murs de sa ville, mais dans l’amour paternel de Dieu. Cette (mauvaise) foi dans la pierre (des murailles) rapproche Jéricho de Sodome, de Babel et des révoltes dont Coré est le type. C’est pourquoi un midrash nous apprend que les murailles de Jéricho furent avalées par la terre, comme Coré. 

(1) Si nous prenons Jéricho, nous nous emparons de toute la Palestine (TanHuma Beha’alotekha).

• Foules (grec du NT : okhloï)  Ensemble des Nations invitées à entrer (lire: se convertir). Les foules sont toujours compactes, pressantes et affamées. Le terme okhlos n’existe pas dans la Septante, c’est du grec « spécial koïne« , en revanche, il est très fréquent dans l’hébreu tardif du Midrash et du Talmud. Dans le NT, il sert à fabriquer des jeux de mots avec le verbe okhel (manger) d’où les scènes où on nourrit les foules. Ces foules sont en général païennes. Parfois cependant elles sont juives : on les reconnaît alors au fait qu’elles stationnent devant une maison empêchant ainsi les païens d’entrer. Ceux-ci doivent alors parfois passer par le toit pour « entrer ». Aujourd’hui encore les Chrétiens prient pour que ce stationnement millénaire se termine enfin par une « entrée », ils demandent en effet à Dieu de permettre « que tout Israël soit sauvé en faisant entrer la foule des gens dans son Eglise ».

• Sept : Figure du comble et de la fin. Le chiffre 10 est aussi une figure du comble qui apparaît clairement dans certaines élaborations comme les dix épreuves d’Abraham. Le chiffre 7 apparaît parfois clairement mais parfois de façon peu apparente. C’est le cas par exemple de la parabole  bien connue du bon grain et de l’ivraie. Un des sens de cette parabole est qu’à la fin des temps le mal sera séparé du bien.
Cette fin des temps est signifiée par le chiffre 7 mais ce chiffre n’apparaît pas directement. Il se cache dans certains détails: le fait que cette péricope tient en 7 versets, que le mot Zizanie revient exactement 7 fois dans Matthieu, et surtout que la lettre  zayin que zizania veut faire entendre est la septième lettre de l’alphabet et vaut  7.