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Est-il permis… ?

 Est-il permis ?

Le présent article est un extrait d’un ouvrage qui porte sur la rétroversion des textes néo-testamentaires. Plus exactement sur la méthode dite AVA fondée sur un ensemble d’hypothèses décrites dans l’article « Allitérations et Rétroversion ».  

 

En Mt 12, 2 nous lisons: Ce que voyant, les Pharisiens lui dirent : Voilà tes disciples qui font ce qu’il n’est pas permis  (ouk exestin) de faire pendant le sabbat! La plupart des rétroversions utilisent pour rendre « il est permis » le terme mishnique mutar. Mais certains versets parlant de ce qui est permis utilisent des sonorités qui plaident en faveur d’autres termes.

• En Mt 19, 3 des Pharisiens (perushim) demandent à Jésus s’il est permis de répudier sa femme pour tout motif. Jésus répond que c’est à cause de leur dureté (qashiut) de cœur que Moïse (moshé) a permis cela, mais qu’à l’origine (me rosh) cela ne l’était pas. Ces assonances en shin et resh permettent de penser qu’on avait ici le terme rashaï רשאי : avoir le droit (2.367 occurrences dans le Judaic Classic Library). Ce terme a l’avantage pour le rédacteur évangélique de posséder la valence messianique (52) vu qu’il a le bonheur d’être l’anagramme de l’hébreu ashré (rétroversion du grec makarios : bienheureux). Le verset pourrait être ainsi rétroverti:

…ויקרבו אליו הפרושים לנסותו ויאמרו : הרשאי איש לשלח את אשתו 

• Ces assonances et allitérations se font entendre de manière plus évidente en Mc 2, 24: Et les Pharisiens lui disaient : Vois! Pourquoi font-ils le jour du sabbat ce qui n’est pas permis ? 

ויאמרו אליו הפרושים ראה כי המה עשים בשבת את אשר לא רשאי

• En Mt 14, 4 Jean fait des remontrances à Hérode:

Jean lui disait : Il ne t’est pas permis de l’avoir.

Le grec aurait pu utiliser un terme d’interdiction de type athemitois (équivalent de l’hébreu asur). Mais il a préferé ici ouk exestin (non permise) ce qui permet de penser que l’hébreu rashaï était présent. Surtout, ce qui plaide ici en faveur de ce terme rashaï, c’est qu’il est proche de rosh (la tête) or on sait les conséquences fâcheuses des remontrances de Jean quant à sa propre tête justement.

• De Même en Mt 12, 12 Or, combien un homme vaut plus qu’une brebis! Par conséquent il est permi רשאי de faire une bonne action le jour du sabbat. 

וכי יקר איש מן הכבש לכן רשאי לעשות טובה בשבת 

 

• En Mt 22, 17 on demande: Est-il permis ou non de payer l’impôt à César? Ce verset se laisse facilement rétrovertir en:

‎? הרשאי לשלם מס לקיסר

• En 1Tm 2, 12 Paul nous explique sa conception du rôle de la femme: Je ne permets pas à la femme d’enseigner ni de faire la loi à l’homme. Qu’elle garde le silence. La rétroversion parle, si l’on peut dire, d’elle-même.

ואינני ארשא לאשה לשנה אף לא להתנשא על האיש אלא תחרש

Rétroversion du terme disciple

Comment rétrovertir le mot disciple qui intervient près de 250 fois dans le NT. La peshitta ainsi que la plupart des rétroversions rendent quasi-systématiquement le grec μαθητής («disciples») par talmid/talmidim. Or la méthode de rétroversion par la recherche d’allitérations nous conduit à nous demander si ce choix est bien justifié dans tous les cas.

• Ainsi en Mt 8, 21 nous lisons: Un autre des disciples lui dit : Seigneur, permets-moi de m’en aller d’abord enterrer mon père. Cet autre disciple pourrait par exemple être un Haber aHer. Nous aurions donc un sérieux concurrent de talmid, car ici le mot HaBeR fait jeu de sonorité avec deux autres termes : aHer et qeBeR (enterrer)

חבר אחר אמר לא אדני הניחה ליו אלך בראשונה לקבר אבי 

• Autre verset qui plaide pour Haver : En Mt 9, 19 nous lisons:

Jésus le suivait ainsi que ses disciples. vayelekh aHarav hu ve Haverav

• En Mt 15, 2 on demande à Jésus pourquoi ses disciples transgressent la tradition des Anciens, ici aussi le terme pour transgresser ‘ovrim (עברים) plaide en faveur de HaBeRim.

Comme les racines hébraïques sont souvent trilitères, on pourrait grossièrement classer les jeux de sonorités en trois catégories. Un jeu de sonorités peut être parfait, convenable ou ébauché. Deux mots (de trois lettres) peuvent avoir trois lettres en commun, ce sont alors des anagrammes et le jeu de sonorités est parfait (exemple qu’on verra plus bas krz et zkr). Les deux mots peuvent avoir 2 lettres en commun, et le jeu de sonorité sera convenable ce qui est le cas général des jeux de sonorité que nous rencontrons. Enfin les deux termes peuvent avoir une seule lettre en commun, le jeu de sonorité est ébauché, mais s’il se répète dans le verset, il produira un effet sonore tout-à-fait étonnant. A ces jeux de lettres il faut bien entendu ajouter les effets de rime ou de rythme (chiasme, etc…), de répétition, de parallélisme.

Voyons quelques exemples obtenus en supposant Haber comme candidat à la rétroversion de «disciple».

• Mt 12, 1 Ses disciples eurent faim (HaBeRav Ra’eBu): Deux lettres en commun.

• En Mt 10,24 on nous explique que le disciple (HaBeR) n’est pas au dessus de son maître (RaBo): Ce verset est loin d’être unique, le rapprochement du disciple HaBer et du maître RaB est observable dans 10 versets.

• C’est le cas aussi en Mt 13, 36 lorsqu’il faut parler (dBR) aux disciples (HBR) et leur expliquer quelque parabole. Les disciples s’approchent de Jésus (qRB) : et s’approchant lui dirent : Explique-nous (Bo’eR)

• En Mt 14, 12 Les disciples de Jean vinrent prendre le cadavre et l’enterrèrent; puis ils allèrent informer Jésus. Le grec ne dit pas vinrent mais s’approchèrent (proselthontes, qRB) verbe qui fait jeu sonore avec l’enterrèrent (qBR) et bien entendu avec nos disciplesHaBeRim (HBR)

 A au moins 17 reprises les disciples de Jésus s’approchent de lui. Qu’ils le fassent une fois ou deux, il n’y a là rien que de très normal, mais autant de fois, voilà qui traduit une certaine insistance, et qui dénote un texte très construit. 

• En Mt 14, 15 les disciples s’approchent, mais «le soir». Le soir venu, les disciples s’approchèrent et lui dirent : L’endroit est désert et l’heure est déjà passée; renvoie donc les foules afin qu’elles aillent dans les villages s’acheter de la nourriture. Grossièrement on peut rétrovertir ce verset de la manière suivante.

ויהי בערב ויקרבו חבריו ויאמרו חרב המקום ועברה השעה שלחה את אכלסים וילכו אל הכפרים לקנות להם לאכל 

On y retrouve de nombreux termes contenant les sons B et R. Le soir (‘eReB) les disciples (HaBeRim) s’approchent (qRB) l’endroit est qualifié en grec d’erêmô (midBaR, ou HaRaBa), l’heure est passée (‘aBRah)…

 • En Mt 26, 56 les disciples (HaBeriM) se sont enfuis (BaRHu).

En Lc 6, 13 nous apprenons que Jèsus choisit ses disciples (BaHaR)

Nous pouvons à ce stade considérer comme acquis que les disciples de Jésus ne sont pas toujours des talmidim, mais très souvent des Haberim. Si nous n’étions pas encore convaincus, voici encore quelques versets pour nous en convaincre: Ils s’agit de versets Johanniques qui parlent du disciple que Jésus aimait.

En Jn 13, 23 nous lisons: Un de ses disciples était installé tout contre Jésus : celui qu’aimait Jésus. La rétroversion de ce verset serait : EHad meHaBeRav asher yeshua HaBaB

 ואחד מחבריו אשר ישוע חבב מסב  

On y voit que HaBeR voisine bien avec HaBaB

 • En Jn 20,2 on nous facilite les choses puisque le verset parle del’autre disciple que Jésus aimait, ce qui nous donne la séquence HaBeR AHeR…HaBaB…et même QeBeR (il se trouve que ce verset parle d’un tombeau)

• Selon Rm 11,28 les Judéens sont chéris selon l’Eléction: soit: חביבים לפי הבחירה

Le verset serait ainsi balancé : Oyevim lepi ha bessora, Habibim lepi ha BeHiRa.

 איבים לפי הבשורה חביבים לפי הבחירה